La mini-série se révèle comme une version moderne de Caïn et Abel, portée par les performances remarquables de Jude Law et Jason Bateman.
À quoi reconnaît-on la famille ? Aux liens du sang ? Jason Bateman n’y croit pas une seconde, privilégiant plutôt la loyauté. Pour celui qui joue le rôle de Vince dans « Black Rabbit », ce nouveau thriller lancé par Netflix il y a quelques jours, cette conception n’est guère surprenante.
Du haut de ses 52 ans, l’aîné des Friedken a toujours fait figure de mouton noir au sein de sa famille. Il a donc passé sa vie à fuir les siens, pour ne plus être montré du doigt.
Le personnage à la barbe et à la chevelure négligées a en effet le don pour décevoir tous ceux qui comptent sur lui, particulièrement son jeune frère Jake, incarné par Jude Law.
Tout au long de ses huit épisodes d’une heure, la série créée par Zach Baylin et Kate Susman suit les péripéties des deux frères, avec un Vince de retour après deux ans d’absence pour semer le chaos, une nouvelle fois.
La mécanique du chaos familial
C’est une trame que l’on devine d’avance, mais cette prévisibilité ne rend pas le drame moins captivant. Au contraire, la série parvient à tenir en haleine. Et c’est bien là sa force.
Car « Black Rabbit » ne se contente pas de rejouer la sempiternelle partition des frères ennemis. La série déploie une mécanique implacable où chaque retour de Vince agit comme une bombe à retardement dans l’existence méticuleusement reconstruite de Jake.
Ce dernier, propriétaire du bar-restaurant éponyme niché près du pont de Brooklyn, a bâti son établissement sur les ruines de leur ancien groupe de rock, les Black Rabbits – un nom qui résonne comme un fantôme du passé.
L’établissement de Jake incarne tout ce que Vince n’est pas : structuré, ambitieux, tourné vers l’avenir. Dans ce lieu qui transpire le New York authentique comme le décrit la critique de John Anderson pour le Wall Street Journal, se côtoient désormais les Lamborghini et les habitués du quartier.
Le #MeToo s’invite au menu
Jake y compte plus que tout, pour y avoir investi tous ses espoirs. Mais Vince, tel un boulet, n’est jamais loin, traînant derrière lui une dette de 140 000 dollars auprès de « Joe Mancuso » (Troy Kotsur), l’usurier sans pitié du coin, dont le propre drame familial se joue parallèlement à celui des frères Friedken.
Son fils Junior (Forrest Weber) finit par se faire tuer à force de multiplier les mauvais choix pour impressionner son père. La série aborde également les enjeux du mouvement #MeToo. Jake, tiraillé entre la prospérité de son établissement et ses tourments moraux, ferme les yeux sur les agressions commises par certains clients du Black Rabbit.
La véritable force de cette série réside dans sa capacité à transformer un thriller criminel en étude psychologique, faisant du chaos orchestré par Vince le révélateur impitoyable des failles de Jake.