Symbole des tensions actuelles entre conviction intime et enjeux politiques, ce long-métrage au message spirituel attise les débats sur la place du religieux en France.
Les habitants de Marseille pourront finalement assister à la projection de « Sacré-Cœur », le long-métrage controversé, dont la sortie début octobre a déclenché de vives réactions à l’échelle nationale.
C’est la décision du tribunal administratif communiquée samedi 25 octobre, à la suite d’une procédure d’urgence engagée par des opposants à la déprogrammation ordonnée par la municipalité peu avant la séance prévue au Château de la Buzine, propriété acquise jadis par Marcel Pagnol et désormais gérée par la municipalité marseillaise.
Une annulation justifiée par la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État. Ce texte de référence protège tant la liberté de conscience que la nécessaire préservation de l’ordre public.
Selon la mairie, « l’application absolue de la loi et des jurisprudences constantes en la matière s’impose à tous les lieux gérés par les collectivités publiques en France ». Au grand dam des auteurs de cette docu-fiction, qui raconte l’histoire de Sainte Marguerite Marie, religieuse visitandine ayant vécu il y a 350 ans, à qui Jésus aurait révélé son cœur « brûlant d’amour ».
Une production polémique
Le film retrace l’évolution de la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus à travers les siècles et son influence mondiale, présentant des témoignages contemporains de personnes dont la vie aurait été transformée par cette dévotion catholique.
Une ode à la foi chrétienne qui n’est pas agréable dans les oreilles de tout le monde. La campagne d’affichage du film a ainsi été refusée par la régie publicitaire de la SNCF et de la RATP, au motif que son caractère confessionnel contrevenait au principe de neutralité du service public.
C’est précisément sur ces polémiques que les médias du groupe Bolloré ont concentré leur attention, dénonçant ce qu’ils qualifient de « christianomépris » ou de « laïcisme ». Le réalisateur, invité sur Europe 1 (chaîne appartenant au groupe), s’est indigné notamment indigné, déclarant : « On nous dit ‘non c’est trop prosélite’. Donc L’Exorciste, Conjuring oui, mais Jésus non. »
La justice tranche
L’ordonnance de justice du tribunal administratif de Marseille, longue de six pages et consultée par BFMTV, est claire : empêcher la diffusion du film dans un cinéma municipal revient à interdire l’accès à une partie du public. Pour le juge, cela constitue une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’expression et à la liberté de création artistique.
Il souligne que la seule programmation d’une œuvre cinématographique à caractère religieux dans un espace municipal ne peut être considérée comme une violation du principe de laïcité, tant que la commune ne manifeste ni reconnaissance officielle ni préférence pour un culte particulier, et qu’il n’y a pas de subvention directe ou indirecte.
