En Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’offensive contre l’écriture inclusive met en péril le secteur culturel

Le conseil régional conditionne ses subventions à l’abandon de l’écriture inclusive. Les structures culturelles se retrouvent prises au piège d’une guerre idéologique.

Le 24 avril dernier, les responsables de l’école des métiers du cinéma Kourtrajmé Marseille apprenaient avec stupéfaction le rejet de leur demande de subvention 2025-2026 de 70 000 euros par la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA).

Motif invoqué par le Rassemblement national (RN), parti faisant figure d’opposition à la majorité régionale de droite et du centre : l’utilisation de l’écriture inclusive dans les supports de communication de l’école cofondée par le réalisateur Ladj Ly.

Celle-ci aurait pourtant dû s’en douter. Car la veille, le conseil régional présidé par Renaud Muselier avait fait voter un texte baptisé « Trajectoire Valeurs » comprenant dix points, dont l’avant-dernier, intitulé « Langue française », énonce le « refus de l’écriture inclusive dans l’administration régionale et dans tous les dossiers de subvention ».

Selon le quotidien régional La Provence, cette initiative réaffirme une motion de 2023 destinée à conditionner les subventions régionales à l’abandon de l’écriture inclusive, qui cherche pourtant à inclure les femmes dans la langue française, au lieu d’utiliser seulement le masculin.

Un positionnement idéologique pleinement assumé

« Depuis quelques mois, le conseil régional nous mettait la pression pour que l’on enlève le point médian de nos documents. Nous n’avons pas donné suite« , explique Marie Antonelle Joubert, directrice de l’établissement, dans des propos rapportés par Le Monde.

Sophie Joissains, vice-présidente déléguée à la culture, citée par le quotidien du soir, ne cache pas sa satisfaction : « L’écriture inclusive, c’est non ! Nous avons une charte des valeurs qui ne permet pas que l’on fasse n’importe quoi avec la langue française« .

Ces propos traduisent un positionnement idéologique assumé. Le conseil régional qui assimile ouvertement l’écriture inclusive à une « idéologie woke », a ainsi engagé une offensive systématique, impliquant dossiers de presse, sites internet, réseaux sociaux, affiches.

Les témoignages recueillis par Le Monde dessinent le portrait d’une administration régionale transformée en police de la grammaire, traquant le moindre point médian dans tous les aspects de la communication des structures subventionnées.

Des associations manifestement impuissantes

« On nous explique que cela peut avoir une conséquence sur le niveau de soutien de la collectivité« , confie un acteur culturel au Monde. Son organisation a dû s’aligner sur cette doctrine, à l’instar du Planning familial et de nombreux festivals.

Cette stratégie du bâton et de la carotte inversée a fait naître une atmosphère de crainte dans le rang de ces organisations souvent fragiles économiquement. Même si quatre syndicats du secteur culturel ont écrit conjointement à Muselier pour, d’après Le Monde, « exiger des précisions sur le périmètre exact de l’interdiction et les textes légaux qui la justifient ».

« Je suis atterrée de voir que parce qu’on utilise un langage qui ne plaît pas aux politiques, ils refusent de financer une action unique, qui permet à de jeunes Marseillais qui n’en ont pas la possibilité d’être formés et d’intégrer les métiers du cinéma« , s’indigne Marie Antonelle Joubert auprès du journal.

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